Se chauffer au chicon, c’est du belge !
Peut-être avez-vous lu un jour dans votre quotidien favori qu’une société avait mis au point un système de récupération d’énergie au départ de déchets de la culture de chicons. Ça se passait à Nivelles. L’énergie ainsi récupérée grâce à un processus de biométhanisation alimente maintenant l’imprimerie Rossel toute proche.
Cette société qui répond au nom évocateur de GreenWatt est implantée chez nous, à Tourinnes-Saint-Lambert, plus précisément à la « ferme rose » à l’entrée de Libersart. J’ai voulu en savoir plus et je suis donc allée à la rencontre de l’équipe. Voici quelques morceaux choisis d’un long entretien avec deux jeunes entrepreneurs passionnés et passionnants. Leur credo : apporter une solution rentable, durable et sans nuisances au traitement des déchets organiques ainsi qu’au besoin d’énergie renouvelable.
Pour faire court, la biométhanisation est un procédé naturel qui permet de produire du biogaz par dégradation des déchets organiques dans un espace fermé et contrôlé, sorte d’accélérateur de la biodégradation. Le biogaz ainsi produit est riche en méthane et peut donc, comme le gaz naturel, être brûlé pour produire de l’énergie (électricité, eau chaude, etc.). A Nivelles, par exemple, la dégradation des racines de chicons produit 60m3 de biogaz pour une tonne de racines (la forcerie de chicons produit quelque 17 tonnes par jour). Cette énergie permet de chauffer de l’eau entre 80 et 95°. Celle-ci est transportée dans des réseaux de conduites fortement isolées et arrive sur les lieux de consommation, la forcerie et les imprimeries Rossel situées à 800m, avec une perte d’un ou deux degrés seulement.
GreenWatt développe une technologie de pointe (dite en deux étapes) qui permet de fonctionner sans apport de lisier et d’accroître le rendement des installations de biométhanisation.
Dans un souci de développement durable, GreenWatt se veut cohérent dans toutes les phases du projet. Il s’agit de récupérer des déchets organiques (de pommes de terre, carottes, melons, etc) ce qui permet aux agriculteurs par exemple de trouver une solution rentable à un problème important. Les installations comprennent un « digesteur » qui traite les eaux usées. Les résidus végétaux résultant de la biométhanisation retournent sur les terres et constituent un engrais de qualité.
Les infrastructures sont de petites unités décentralisées conçues pour fonctionner localement sur les sites mêmes de production agro-alimentaire, ce qui réduit le transport des matières premières et donc de l’émission de CO2.
Selon ses promoteurs, l’unité de biométhanisation ne pollue pas et n’engendre aucune nuisance olfactive ou sonore. Enfin, l’énergie ainsi produite constitue une alternative à l’énergie fossile. Ce procédé permet donc de combiner recyclage et valorisation énergétique des biodéchets.
La biométhanisation est une technologie d’avenir. Elle se répand dans de nombreux pays comme l’Allemagne, la Suède, la Finlande. Plus près de chez nous, le village rural de Beckerich au Grand-Duché de Luxembourg a installé plusieurs unités de biométhanisation qui produisent l’électricité pour quelque 800 ménages, la chaleur pour l’équivalent de 120 ménages et alimentent le chauffage d’une piscine et de bâtiments communaux. En Belgique, la ville de Genappe envisage la biométhanisation comme l’un des moyens pour avancer sur la route de l’indépendance énergétique et des énergies renouvelables.
GreenWatt lui-même a pour le moment plusieurs projets dont un à Thorembais et d’autres en France, en Suisse pour alimenter, des écoles, des maisons de retraite, etc. Ce système qui semble idéal à bien des égards a un coût relativement élevé mais différentes aides et primes de la Région wallonne peuvent en réduire considérablement l’impact.
Pourquoi pas à Walhain ? Cela aurait du sens, m’ont affirmé mes interlocuteurs. Le gisement est là (nombreuses exploitations agricoles dans la commune), on peut donc développer cette technologie en local et alimenter en énergie des bâtiments publics ou autres, selon les choix. Ce qu’il faut, c’est une volonté politique, une mobilisation d’acteurs individuels ou d’une collectivité qui portent le projet.
Voilà qui mérite d’être exploré…
(Article réalisé par Danielle Gallez sur la base d’un entretien avec les responsables de GreenWatt)